Gérard Labat : « J’ai un raisonnement de citoyen » | [Im]Patients Chroniques & Associés

0

Membre de la FNAIR – Fédération nationale d’aide aux insuffisants rénaux – Gérard Labat est aussi l’actuel représentant des [Im]Patients, Chroniques & Associés au CNCPH – Comité national consultatif pour les personnes handicapées. Son implication auprès de multiples instances de santé traduit la curiosité de cet homme passionné d’histoire mais aussi profondément préoccupé par les problèmes de son époque.

Il n’a pas hésité longtemps avant d’accepter de représenter les [Im]Patients, Chroniques & Associés au CNCPH (Comité national consultatif pour les personnes handicapées). A bientôt 65 ans, et après une carrière bien remplie – comptable, puis chef de projet informatique dans le transport aérien – Gérard Labat n’a pourtant plus grand chose à (se) prouver. Personne, non plus, ne s’est essayé à lui forcer la main, tant cet homme qui se définit comme « très autonome et indépendant d’esprit » est peu influençable. « Je suis le véritable égoïste, celui qui n’emmerde pas les autres mais qui du coup ne veut pas que les autres l’emmerdent », cabotine-t-il, laissant deviner une image ronchonne que très peu lui connaissent. Si Gérard Labat a accepté cette dernière mission de représentation (qui s’ajoute à de multiples autres, auprès de l’assurance maladie, du ministère de la santé et d’autres institutions ou associations), c’est d’abord parce qu’il lui plaît « de pouvoir peser sur les décisions qui contribueront à une meilleure organisation du système de santé en France, même à notre petite échelle. »

L’homme qui a dit « oui, mais… »

Comme certains ont le sens de la formule, Gérard Labat a celui de la nuance, et du mot juste. A la question « quel type de militant êtes-vous ? », il rectifie : « Je n’ai pas l’âme militante, je suis trop individualiste pour ça, mais j’ai un raisonnement de citoyen. » Et tant pis pour ceux que cette franchise choquerait. « Je suis assez indifférent à ce que l’on peut penser de moi, seule compte l’opinion de quelques-uns de mes amis. » Cette confiance en soi, alliée à une parfaite connaissance des dossiers et à un esprit de synthèse le rangent souvent, lors des Conseils d’administration de la FNAIR ou des [Im]Patients, Chroniques & Associés, du côté de ceux dont l’avis compte, même en l’absence d’un mandat électif. Il le sait, mettre le doigt dans l’engrenage du monde associatif est un risque pour ceux qui ne savent pas dire non. C’est lorsque son centre de dialyse s’est installé dans de nouveaux locaux et qu’il a fallu trouver des représentants des usagers qu’il a dit oui pour la première fois. Depuis, il participe (très activement) à la vie de plusieurs associations mais sait aussi cultiver l’art de la bonne distance, celle qui permet de s’investir sans se laisser happer.

Cette distance, érigée presque en principe, ne révèle en rien un désintérêt du monde. Pour s’en convaincre, deux méthodes : lui parler d’histoire, une passion découverte à l’adolescence et qu’il cultive encore aujourd’hui en suivant des cours au Collège de France ; ou bien le lancer sur notre système de santé… et se mettre aux abris : « Aucun gouvernement n’a le courage de s’attaquer au problème de la santé sur une vision de 30 ans ! Normal, un politique raisonne au mieux jusqu’à la prochaine élection. A coût constant, on pourrait faire beaucoup plus performant et avec une meilleure qualité de remboursement… Ce système est bordélique en diable ! » Un peu calmé, Gérard déclarera plus tard admirer « le pragmatisme anglo-saxon, mais pas leur idéologie. J’aime leur façon de se dire que ce qui n’a pas marché hier peut marcher aujourd’hui. Par contre, je préfère notre système de santé solidaire à celui des Américains », nuance-t-il.

La vie malgré la maladie

Parisien « de pure souche », Gérard Labat a toujours habité dans le quartier populaire de Saint Fargeau-Télégraphe (dans le 20ème arrondissement, au nord-est de la capitale). « Je n’ai pas le bagout du titi parisien, mais mes racines sont là, admet-il. A la retraite, je n’ai d’ailleurs pas du tout envisagé de quitter Paris. » La ville qui l’a vu grandir a aussi été la spectatrice de sa première pathologie chronique, l’insuffisance rénale. A l’époque où le premier symptôme apparaît (de l’albuminurie, c’est-à-dire du sang dans les urines), il n’a que 7 ans et aucun médecin ne s’alerte. Pas plus d’ailleurs qu’à 20 ans, lorsque la maladie est clairement avérée et que l’on en connaît l’issue (la dialyse ou la greffe). C’était il y a 45 ans : la préhistoire de la prévention en néphrologie. « Entre temps, poursuit Gérard, j’ai chopé le VIH, à une époque où il n’y avait pas de médicaments. C’était l’hécatombe. C’est finalement l’infectiologue qui a détecté que la créatinine (la variable biologique qui permet de mesurer le fonctionnement des reins, ndlr) commençait vraiment à faire des siennes. C’est donc à ce moment-là qu’on m’a renvoyé vers un néphrologue. Ca a tenu un moment puis ça a craqué brutalement, au point de surprendre les médecins. » Admis en dialyse en urgence, Gérard aura eu la  » chance  » de ne connaître cette technique d’épuration rénale qu’une fois à la retraite. La fatigue qu’elle génère rend en effet la vie professionnelle difficilement conciliable. « Même à la retraite, il faut parfois se pousser pour sortir, voir des amis, aller au resto, c’est ça le plus dur », précise-t-il.

Malgré tout, Gérard considère « chaque instant comme un instant de vie et de plaisir. J’en ai pris conscience au moment où j’ai été infecté par le VIH et je me dis maintenant que chaque jour est un renouveau. Tous les matins, tout recommence et tout est possible ! »

Romain Bonfillon

Les [im]Patients, Chroniques & Associés et moi

« Parmi toutes les revendications des [im]Patients, Chroniques & Associés, je suis particulièrement sensible à celles qui consistent à maintenir dans l’emploi les personnes atteintes de maladies chroniques. Beaucoup d’entre elles peuvent et veulent travailler ! Il faut tout faire pour éviter qu’elles ne se retrouvent dans une situation d’assistanat. C’est la meilleure façon de les réintégrer. Pour y parvenir, il conviendrait notamment d’imposer aux entreprises qui ne respectent pas la règle des 6 % (quota obligatoire de personnes handicapées pour les entreprises d’au moins 20 salariés, ndlr) des amendes qui soient dissuasives. »